vendredi 2 décembre 2011

Non sens

La Belgique sort enfin du tunnel. Peut-être faudrait-il dire d'un tunnel. Le gouvernement fédéral est enfin presque formé. L'accord est dégagé. Mais ce gouvernement gouvernera-t-il vraiment? On se pose la question. L'Europe, les marchés, les agences de notation l'ont contraint à nous proposer un régime minceur, un programme de gouvernement sans vision autre que celle de faire des économies, de serrer la vis. Qui a encore un projet pour nos sociétés? Dans le Soir (1), Yvon Toussaint relève cette impression, que nous sommes nombreux à partager, "que tout se détraque. Qu'on a égaré les codes et les modes d'emploi. Que plus personne, nulle part, n'a de vision structurante de nos sociétés. Que les marchés sont non seulement irrationnels mais pervertis. Que les tentatives d'explication se traduisent par une technicité décourageante. Et, en tout état de cause, que ce qui reste à espérer ce sont des pauses, pour respirer un peu et des attelles pour empêcher la dislocation du système. Rien de plus, hélas".
La manifestation syndicale d'aujourd'hui, à Bruxelles, fut un succès de foule. Mais n'indique rien d'autre qu'une crispation - logique et compréhensible - sur des acquis à défendre. Elle n'indique pas d'autre voie. Les discours syndicaux entendus ce matin sur Matin Première étaient juste flous et vaguement inquiets. L'époque est au vague et au ballotage.
"Nous en sommes là, écrit Gérard Biard (2): paumés au beau milieu d'un système qui s'est emballé et dont la peur est devenue le moteur - on n'agit plus que par crainte du marché. Et plus personne, pas plus ceux qui ont mis en place ce système que ceux qui en sont les acteurs, ne maîtrise quoi que ce soit. Ni les banques, prises à leur propre jeu de dupes, ni les spéculateurs, qui pédalent comme des hamsters dans une roue de la fortune virtuelle, ni les Bourses, qui paniquent en cascade, ni bien sûr les politiques, victimes d'un système absurde qu'ils ont voulu, qui les détruit, mais qu'ils s'obstinent à considérer comme le meilleur possible. Personne n'a pris le pouvoir, pour la bonne raison que plus personne ne le détient."
Yvon Toussaint cite cette phrase d'Yves Montand: " je continue d'espérer, je ne crois plus".

(1) "Ces crises qui nous décervellent", le Soir, 2 décembre 2011
(2) "Les hamsters qui nous gouvernent", Charlie Hebdo, 30 novembre 2011

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