samedi 10 janvier 2015

Indignité

Jean-Marie Le Nauséabond n'arrive pas à maîtriser ses incontinences verbales. Voilà que, profitant du massacre de l'équipe de Charlie, il appelle à voter Le Pen (1), se désolidarisant du mouvement de soutien, en déclarant qu'il n'est pas Charlie, mais "Charlie Martel", voulant signifier qu'il est celui qui arrêtera l'invasion arabe. C'est vrai, ce type est complètement martel depuis longtemps, maniant en toutes occasions - même en celles qui réclameraient un minimum de dignité - de la morgue, de la suffisance et du mépris. Si le FN ne se sépare pas tout de suite de son président "d'honneur", c'est qu'il n'est décidément pas dédiabolisé. Le diable éructe à sa tête.
De toute façon, comment la fille à papa et ses sbires oseraient-ils participer au rassemblement de ce dimanche? Charlie Hebdo et eux se faisaient la guerre. Combien de dessins et d'articles de Charlie n'ont pas dénoncé les positions populistes, racistes, nauséabondes, extrémistes du vieux chef, de l'héritière et de leur parti? Cabu, Charb, Honoré, Tignous, Wolinski, Oncle Bernard et tous les autres en avaient fait une de leurs cibles préférées.
En 1996, l'équipe de Charlie avait lancé une pétition pour "dissoudre le FN, cette ligue dont le but politique est de faire disparaître la République". Elle recueillera 173 704 signatures. Deux ans plus tard,  l'équipe de Charlie constate que le FN a oublié de renouveler le dépôt légal de la marque Front National. Il effectue alors cette formalité auprès de l'INPI, pour "restituer le nom aux résistants" du vrai Front National, créé en 1941 par des militants communistes pour lutter contre les nazis (2). 
"Les électeurs du FN ne votent pas pour changer la société qui les opprime, écrivait Charb (3), ils votent pour se venger perversement sur les immigrés de malheurs dont ces derniers ne sont pas responsables. Les frontistes ne veulent pas mettre à bas le patronat qui les roule dans la farine, ils veulent devenir les contremaîtres du capitalisme pour pouvoir botter le cul des étrangers. Les électeurs du FN souffrent moins qu'ils ne veulent faire souffrir. En ce sens, ce sont des malades, mais d'une autre nature que celle que l'on prétend."
Combien de procès des élus et des factions d'extrême droite n'ont-ils pas intenté à Charlie (pour les perdre, le plus souvent) (4)? 
Alors, comment le parti de la famille Le Pen pourrait-il aller s'incliner devant les dépouilles des morts de Charlie sans apparaître comme hypocrite? Ce parti sait-il ce que signifient les mots dignité, respect, réserve?
Comme d'habitude, il prend sa posture préférée, celle de victime. Il ne pleure pas sur les dessinateurs et journalistes, mais sur son sort à lui, mis dans le coin, pas invité aux rassemblements de ce dimanche. Allez savoir pourquoi, il ne suscite aucune compassion. Juste un peu plus de mépris encore.
Donc, pas de FN ce dimanche, mais aussi, de grâce, pas de drapeaux, pas de messes, pas de Marseillaise, pas de Panthéon. Ils ont vécu libres, ils sont morts libres. Qu'ils le restent.

P.S.: lire à ce sujet:
 www.liberation.fr/politiques/2015/01/09/pour-charlie-voir-le-front-serait-un-affront_1177337

(1) www.huffingtonpost.fr/2015/01/09/jean-marie-le-pen-front-national-charlie-martel-hebdo-tweet-declarations_n_6443248.html?utm_hp_ref=france
(2) Jean-Yves Camus: "Front National, laboratoire de l'UMP?", in "1992-2012 - Charlie Hebdo" (hors-série).
(3) Charb: "La souffrance de l'électeur frontiste", in "1992-2012 - Charlie Hebdo" (hors-série).
(4) www.lemonde.fr/societe/article/2015/01/08/charlie-hebdo-22-ans-de-proces-en-tous-genres_4551824_3224.html

4 commentaires:

gabrielle a dit…

Cette "famille" est insupportable. Mal élevée. Ecoeurante. Est-ce qu'elle pourrait pour une fois se taire et respecter ceux qui veulent se souvenir en silence de tous ceux qui sont morts mercredi?

gabrielle a dit…

Précision: se souvenir de tous ceux qui ont été massacrés mercredi, jeudi et vendredi.

Didier L. a dit…

Le Pen, qui prétendait représenter 25% du "peuple" (en fait des suffrages exprimés dans une élection à grande abstention), est descendue aujourd'hui à 1000 contre 2,5 ou 3 millions (Paris + Province, hier et aujourd'hui, et sans parler des rassemblements au-delà de la frontière, jusqu'au Canada et à Moscou, en passant par Vienne et Bruxelles). Bref, elle a voulu compter en allant à Beuxaiee et elle est descendue à 0,03% : c'est pas beaucoup :).

Michel GUILBERT a dit…

Une journaliste de France Inter remarquait ce matin que Marine Le Pen, en manifestant en terrain "conquis", se dissociait du reste de la société, à contre-courant de l'objectif des rassemblements d'aujourd'hui. La fille à papa a fait la démonstration aujourd'hui qu'elle ne sait pas, qu'elle ne veut pas jouer le jeu démocratique. Combien de chefs d'Etat sont venus aujourd'hui à Paris sans y être invités? Môdame, elle, doit l'être. Sa suffisance l'a mise hors jeu. Sa bêtise aussi. Grand mal lui fasse.